Propositions socio-économiques

1. 2019-2024 : LES SUCCÈS DES COMMISSAIRES ET DÉPUTÉS EUROPÉENS SOCIAUX-DÉMOCRATES L’UE s’est révélée indispensable pour apporter des réponses à l’échelle européenne aux multiples crises conjoncturelles et structurelles contemporaines, contrairement à ce que pourraient affirmer les partis eurosceptiques. Depuis les élections européennes de 2019, les commissaires et les députés européens socio-démocrates ont porté des initiatives de gauche pour faire face à ces crises, tout en promouvant une Europe plus verte qui protège les plus vulnérables. En réponse à la crise du COVID 19, le commissaire Paolo Gentiloni (IT), en charge de l’économie, a, joué un rôle crucial dans la mise en place de la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR). Premier emprunt public de l’UE, ce fonds inédit de 720 milliards d’euros soutient la relance économique de l’UE, en aidant les États-membres à investir dans les transitions énergétique et digitale et limiter l’impact de la crise économique. Sous l’impulsion de Gentiloni et du commissaire Nicolas Schmit (LU) en charge de l’Emploi, un mécanisme temporaire d’assurance chômage européenne—SURE—a également été adopté afin d’aider les travailleurs qui ont perdu leur emploi à conserver une partie de leur revenu. En réaction à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la commissaire Elisa Ferreira (PT) en charge des politiques de Cohésion et Nicolas Schmit ont débloqué des fonds—CARE—pour aider les états-membres à accueillir les réfugiés ukrainiens et faciliter l’intégration des travailleurs sur le marché du travail. L’Europe a également fait face à des bouleversements plus structurels—changement climatique, développement de l’économie digitale, remise en cause du libre-échange, changement démographique… Les représentants socio-démocrates ont aussi activement participé à doter l’Europe de moyens pour répondre à ces défis. Au niveau macro-économique, Gentiloni a joué un rôle clef dans la conception d’une première proposition (perfectible) de réforme du Pacte de stabilité pour le rendre moins contraignant. Une nouvelle directive mettant en place un taux d’imposition minimum pour les entreprises multinationales a également été adoptée. Au niveau climatique, Frans Timmermans (NL) est le principal artisan du Green Deal, un paquet de réformes visant à placer l’Union européenne sur la voie de la neutralité climatique d’ici 2050, tout en accompagnant les plus vulnérables dans cette transition, via la création, par exemple, du Fonds pour une Transition Juste. En accord avec le plan d’action pour rendre effectif le Pilier européen des Droits Sociaux adopté en 2021, Nicolas Schmit a porté de nombreuses réformes pour protéger les droits des travailleurs et des plus démunis durablement. La directive pour améliorer les conditions de travail des travailleurs des plateformes numériques et la directive pour fixer des montants de salaire minimum décents en sont des exemples. 2. INSUFFISANCE DES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION Les socio-démocrates ont œuvré à protéger et accompagner les plus vulnérables à travers les bouleversements contemporains mais ont été limités par la composition des institutions européennes majoritairement libérales ou conservatrices (9 commissaires socio-démocrates sur 27 à la Commission; 254 députés de gauche—Verts, S&D, GUE/NGL—sur 705 au Parlement). De ce fait, de nombreux projets de réforme restent à compléter. Bien que s’écartant d’une logique d’austérité budgétaire, les nouvelles règles fiscales proposées par la Commission manquent, par exemple, de dimensions environnementale et sociale pour faciliter des investissements clés dans ces domaines . Aujourd’hui, l’UE se trouve ainsi au milieu du gué. L’Union résiste aux différents bouleversements ; se dote d’instruments pour améliorer sa compétitivité dans certains secteurs clés (tels que les micro-processeurs); se fixe des objectifs climatiques et sociaux ambitieux. Néanmoins, force est de constater que les moyens engagés ne sont pas suffisants. Par exemple, l’UE vise la neutralité carbone d’ici 2050 et, en guise d’objectif intermédiaire, la réduction d’ici 2030 de 55% des émissions de gaz à effet de serre comparées à celles émises en 1990. Alors qu’il faudrait que l’UE baisse ses émissions de 3% tous les ans depuis 2020 pour atteindre ce dernier objectif, elles ont augmenté de 6% entre 2020 et 2021 . Aussi, bien que l’UE se soit fixé l’objectif de réduire le nombre de personnes à risque de pauvreté et d’exclusion sociale de 15 millions entre 2019 et 2030 dans son plan de mise en œuvre du Pilier des Droits Sociaux, 3,1 millions de personnes supplémentaires sont devenues à risque de pauvreté et d’exclusion sociale entre 2019 et 2021 . Autrement dit, tant sur le plan climatique que social, l’UE ne semble pas être à la hauteur des objectifs qu’elle s’est elle-même fixée. Prolonger les réformes amorcées sera primordial pour les atteindre, mais risque de ne pas être suffisant, étant donné les limites du modèle de croissance actuelle de l’UE. 3. LA CROISSANCE DU BIEN-ÊTRE DURABLE COMME ALTERNATIVE A LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE ET AUTARCIQUE L’ambition de rendre l’Union européenne plus juste, plus écologique, plus sociale et plus autonome ne sera pas l’apanage du seul Parti Socialiste (PS) et de ses alliés durant les élections européennes. Nos concurrents mettent en avant, approximativement, deux modèles et le PS et ses alliés pourraient se faire le héraut d’un 3ème : Le modèle de croissance économique des libéraux et conservateurs—Renaissance et LR en France, Renew et le PPE en Europe. Les libéraux—comme Emmanuel Macron—et une partie des conservateurs—comme Ursula von der Leyen—entreprennent de décarboner/verdir l’Union européenne, bien que de façon limitée . Leur méthode consiste à promouvoir une croissance classique du PIB afin de financer des investissements en faveur de la transition écologique (et de l’Etat-providence) . Or le PIB est un indicateur connu pour son incapacité à nous informer sur les impacts écologique et social de la création de richesse comptabilisée et sa croissance pour être synonyme de pollution et d’accroissement des inégalités . Autrement dit, leur modèle de croissance risque de nous faire reculer de deux pas pour nous faire avancer d’un. Le modèle de croissance nationaliste/autarcique des partis d’extrême droite—RN en France, Identity and Democracy en Europe (ID). Des propositions des tenants du RN ressort un modèle de croissance basée sur un protectionnisme national , un « localisme », et une « écologie non-punitive ». Cette dernière idée aurait pu expliquer le refus du groupe ID de voter au Parlement européen certaines propositions législatives importantes telles que la loi européenne sur le climat qui fixe l’objectif d’une économie climatiquement neutre d’ici 2050, arguant que les plus vulnérables seraient les premiers à subir les conséquences de ces initiatives. Seulement, une telle explication se heurte à leur refus de voter la mise en place de fonds—comme le Fonds social pour le climat en avril 2023—pour aider ces mêmes personnes vulnérables. Leur politique socio-économique est ainsi punitive tout en étant plus polluante qu’écologique. Aussi, le protectionnisme national français prôné minerait les économies d’échelles permises par le marché unique et plus généralement la cohésion européenne, et ce, à une époque où le besoin d’une Europe compétitive, unie et influente n’a jamais été aussi fort. Le modèle de la croissance du bien-être durable. Face à ces deux modèles, le PS pourrait promouvoir une alternative : la mise en cause de la croissance du PIB comme finalité première des politiques économiques, au profit de la croissance du bien-être durable, notamment des plus vulnérables, et ce d’une manière durable et garantissant une « autonomie stratégique ouverte » . Portée par le Parti socialiste européen , cette idée de changement de notre manière de gouverner l’économie européenne pourrait rassembler divers acteurs—allant des partis de gauche , à la Confédération Européenne des Syndicats et les tenants d’une décroissance... Radical, ce changement n’en serait pas moins faisable : un nombre important d’instruments de pilotage consacrant la centralité du PIB pourraient, par exemple, être réformés sans nécessiter de modifications de traité. La Commission européenne avait entre-ouvert la porte : ouvrons-la en grand et imposons ce prisme-là. 4. NOS PROPOSITIONS POUR LA MANDATURE 2024-2029 Les propositions ci-dessous pourraient favoriser un nouveau modèle de croissance durable centré sur le bien-être de tous, et par le même biais, une Europe plus juste, plus écologique, plus sociale et plus autonome. Ces propositions ont également été sélectionnées pour leur capacité à rassembler une large coalition d’acteurs ainsi que leur propension à être adoptées sans nécessiter de changements des Traité européens. A. Placer le bien-être soutenable au cœur de la gouvernance économique européenne en réformant le Semestre européen. Alors que seuls les déséquilibres macroéconomiques font l’objet d’une surveillance approfondie dans le cadre du Semestre, les déséquilibres en matière écologique et sociale pourraient également être surveillés par le biais d’indicateurs et pris en compte pour faire du Semestre un outil de coordination économique en faveur du bien-être. B. Développer une politique industrielle qui renforce l’autonomie de l’UE en facilitant l’investissement dans des industries stratégiques pour compléter les efforts de la Commission sortante . Une amélioration de la proposition de révision des règles fiscales avec une meilleure prise en compte du besoin en investissements environnementaux et sociaux pourrait être envisagée tout comme : la pérennisation de la FRR—en assurant une implication accrue des collectivités locales dans l’allocation des fonds—et de l’Encadrement temporaire en matière d’aides d’Etat ; le renforcement des conditions d’octroi de fonds sur la base de critères et d’indicateurs inclus dans un Semestre européen réformé; et l’adoption d’une nouvelle taxonomie éco-sociale pour mieux orienter les investissements privés. C. Faire du marché du travail européen un marché qui protège et émancipe, en s’appuyant sur le Socle européen des Droits Sociaux et en renforçant le dialogue social européen afin de promouvoir un partage de la valeur plus équitable à travers l’UE et de meilleures conditions de travail, avec, par exemple, un accord sur la semaine de travail de 4 jours ; en développant un mécanisme d’assurance chômage européen pérenne dans le sillon de SURE ; en améliorant la coordination de la FRR et de fonds de Cohésion notamment dédiés à la Transition Juste—des fonds au montant qui pourrait être augmenté—, afin d’aider les travailleurs et les régions les plus impactés par les transitions climatiques et digitales et de limiter les déséquilibres au sein de l’UE; en adoptant une initiative en faveur d’une allocation universelle pour les enfants afin de lutter contre la pauvreté infantile et promouvoir l’égalité des chances, dans une logique d’investissement social . D. Financer ces investissements en faveur d’un bien-être soutenable en s’appuyant sur une création de richesse vertueuse et des contributions solidaires. En complément des mécanismes déjà adoptés—comme le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières—, une augmentation du taux minimal d’imposition des sociétés , un impôt européen sur le patrimoine financier des plus aisés voire sur la fortune pourraient être adoptés à l’échelle européenne.

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