Le temps des Femmes – Eveline LACROIX, militante section de Vesoul
Les évènements qui se sont déroulés durant plusieurs jours suite à la mort du jeune Nahel âgé de 17 ans abattu par un tir policier, et les multiples commentaires des politiques du gouvernement et de certains médias, nous montre à voir et à entendre un nouvelle fois le rejet de l’état de ses responsabilités sur la défaillance parentale. Sont essentiellement visées les familles mono parentales sachant que pour 85/100 d’entre elles le parent seul est une femme.
Ainsi la responsabilité des femmes est clairement ciblée une fois encore. Ceci est insupportable, indécent. Cette actualité nous donne des raisons de nous indigner et de nous questionner.
Nous indigner parce que le regard qui est porté sur les mères solo est souvent dépréciatif, les sociétés bien pensantes les somment d’assumer leurs choix de vie (y compris si celle-ci est subie) sans chercher à connaitre leur situation réelle. Qui peut dire que c’est par choix qu’une mère laisse son enfant errer et glisser vers l’incivilité et la délinquance, quel parent ne souhaite pas pour son enfant une vie paisible et heureuse. Quel ignorant préconise la fessée pour contenir son enfant, quel incompétent propose la suppression des allocations familiale pour punir les parents d’être de mauvais parents, …
Nous questionner parce que force est de constater que les pères sont les grands absents dans leur rôle de parent. Pourquoi ?
Une injonction est faite aux femmes que leur (pseudo) épanouissement passerait par la maternité. Ceci est de moins en moins vrai mais cela ne concerne pas les mêmes catégories sociales. Les femmes de classe sociale moyenne à supérieure accèdent à plus d’opportunité pour se réaliser et tenir une place dans la société, sans avoir à passer par la case maternité ou alors de manière choisie. Pour accéder à une reconnaissance sociale, une visibilité sociale, certaines femmes ne peuvent passer que par le statut de mère.
D’un coté cette prescription culturellement induite et de l’autre le reproche de ne pas choisir le(s) bon(s) père(s). C’est une injonction paradoxale !
Ou sont donc les pères ? Comment les engager dans une co-responsabilité au sein d’une relation affective et sexuelle ? Comment faire prendre conscience aux hommes de leur pouvoir de fertilité (100 /100 du temps) et donc leur responsabilité de procréation ? Mais là encore la responsabilité d’une grossesse non voulue est entièrement assumée par la femme (tout comme la contraception d’ailleurs !) Il serait nécessaire d’inclure dans l’éducation la notion d’égalité, de responsabilité, de respect dès le plus jeune âge et dès que les services publiques ont accès à l’enfant et durant tout le temps qu’ils y ont accès : suivi PMI, école maternelle (???), primaire, collège, lycée,…et en parallèle des vrais cours d’éducation à la sexualité, afin que garçons et filles possèdent toutes les infos pour s’assumer dans leur choix de vie sexuelle. On ne doit pas attendre que l’enfant, l’adolescent ou le jeune adulte questionne, c’est à l’éducateur de lui livrer au fur et à mesure de son développement, de sa maturité, ces concepts égalitaires et ces connaissances physiologiques.
Ou sont donc les pères ? Pourquoi se sentent-ils moins concernés par leur paternité que les mères par leur maternité ? On peut évoquer pour ces dernières la production d’ocytocine, ou hormone de l’attachement. Si ce lien est quasiment inné du coté de la mère, il peut et doit être construit chez le père. L’implication de ce dernier est à soutenir, voire à solliciter dès que l’annonce de la grossesse est officiellement faite auprès des services compétents. Sa présence tout au long du parcours de grossesse est appelée à favoriser son attachement au futur enfant et à rejoindre la mère. La paternité et la maternité deviennent alors parentalité (à ne pas confondre avec conjugalité) Imposer le congé paternité et d’accueil de l’enfant relève de cette même analyse.
En mobilisant tout le système éducatif afin de déconstruire les stéréotypes de genre, la société peut devenir plus égalitaire. Nous devons cela à nos filles mais aussi à nos garçons qui portent eux l’injonction à la virilité. ’’On ne naît pas fille on le devient’’, idem pour les garçons ! L’engagement de l’état se doit d’être significatif en terme financier mais aussi dans ses convictions. Ainsi être persuadé que rendre le congé paternel obligatoire et même l’allonger (avec des contrôles), favoriserait le lien père/enfant avec tout ce qui peut en découler de positif par la suite. Renforcer l’existant dans l’accompagnement à la parentalité est un autre axe de mobilisation pour des hommes éloignés de cette notion.
Nous devons aux femmes de ce pays une égalité civile : égalité devant la loi par opposition aux régimes des privilèges ; une égalité sociale : qui cherche à égaliser les moyens ou les conditions d’existence ; une égalité politique : qui implique le citoyen dans la cité. Les gouvernements se doivent d’exiger’’ la pleine assimilation légale, politique, et sociale des femmes".
Le temps des femmes, … c’est le temps de l’éducation des hommes.