Contribution Fédérale Rhône et Section PS Lyon 8 : Politique d'accueil en Europe

La Fédération du Rhône du Parti socialiste et la section du 8e arrondissement de Lyon, ont choisi de se saisir de la Convention Europe pour débattre de la politique migratoire européenne, aux côtés de Sylvie Guillaume, députée européenne, d’acteurs associatifs engagés, comme Yves Grellier, ancien président régional de la CIMADE et d’élus locaux, avec Sandrine Runel, Adjointe au Maire de Lyon, en charge des solidarités et de l’inclusion sociale. Notre débat fédéral s’est tenu le soir-même de l’attaque terrible survenue à Annecy, le 8 juin dernier, laissant déjà présager au-delà de l’émotion légitime qui nous traversait, les amalgames et l’instrumentalisation qui seraient faits au sujet du droit d’asile et du statut des personnes réfugiées, par l’extrême-droite et malheureusement bien au-delà. Vouloir aborder sereinement la question du droit d’asile et des politiques migratoires en Europe et en France, c’est d’abord rappeler quelques chiffres. En 2020, dans le Monde, plus d’1 migrant sur 5 vit aux Etats-Unis. Le deuxième pays répertoriant le plus de migrants est l’Allemagne. Proportionnellement à sa population, la France accueille ainsi deux fois moins d’immigrés que l’Allemagne, la Belgique ou les Pays-Bas, et trois fois moins que la Suède ou l’Autriche. Elle se trouve donc au bas du classement des pays d’Europe occidentale, au même niveau que l’Italie et le Royaume- Uni. Concernant les demandes d’asile, entre 2015 et 2019, la France a enregistré un taux de demandes d’asile équivalent à 0,17 % de sa population. Ce qui la place en deçà de la Belgique, et surtout loin derrière l’Allemagne et la Suède dont les demandes d’asile ont été respectivement deux à trois fois plus élevées. Alors que l’Union Européenne est en train d’étudier un énième Pacte Asile Migration, la recherche d’un véritable équilibre entre responsabilité et solidarité apparait toujours difficile à atteindre, face aux États-membres les plus réfractaires à la migration. Et si des progrès ont pu être faits ces dernières années sur la mise en place de mécanismes de solidarité entre États- membres, ou via des coalitions majoritaires au sein du Parlement Européen pour soutenir une politique de l’accueil, la Commission Européenne et le Conseil ne proposent que peu d’améliorations fortes et continuent de se saisir de cette question dans une vision essentiellement défensive. C’est d’ailleurs cette même vision défensive qui conduit à une remise en cause et à la multiplication des exceptions à la liberté de circulation, principe pourtant fondateur de l’Union Européenne. Au cours de notre débat, nous avons partagé notre indignation quant à la situation actuelle des travailleurs sans papiers, aujourd’hui les plus précaires de notre société et qui assurent pourtant des services essentiels. Et derrière cette question des métiers en tension et de la régularisation des travailleurs sans-papiers, nous devons dénoncer les hypocrisies nombreuses, pour aborder cette question sous l’angle des rapports sociaux et économiques. Nous avons aussi pointé les dangers d’une politique migratoire dite de l’excellence, dans laquelle les pays d’Europe choisissent les compétences professionnelles qu’ils souhaitent reconnaître en fonction de leurs besoins et au détriment bien souvent des politiques de co- développement. Ce débat a également révélé beaucoup d’interrogations sur la difficulté à imposer une répartition des demandeurs d’asiles et des migrants entre États-membres et la limite des mécanismes de sanctions financières, dans la mesure où certains États-membres préfèreraient payer pour ne pas accueillir des demandeurs d’asile. L’Union Européenne elle- même, préfère verser des montants financiers considérables, à des États tiers, pour lutter contre l’immigration clandestine et éviter d’accueillir sur son sol des personnes migrantes. Une vision d’externalisation, loin des valeurs européennes que nous défendons. De surcroit, faute de politique d’accueil assumée et ambitieuse, l’Union Européenne peut se trouver confrontée à des tentatives de déstabilisation et de chantage migratoire de la part de régimes autoritaires, comme ce fut le cas en 2021 avec la Biélorussie. Certaines situations internationales, comme celle que connait actuellement le Haut-Karabagh, nous interrogent sur la capacité de l’Europe à anticiper les crises, les situations de danger des populations proches de ses frontières et les nécessaires mesures de protection. Néanmoins, l’expérience de la crise ukrainienne et le déclenchement pour la première fois de la directive sur la protection temporaire, nous montrent que la mise en place d’un mécanisme d’accès rapide et direct aux droits est possible. Ainsi, depuis février 2022, les ressortissants ukrainiens, qui désirent rester en France, peuvent bénéficier d'une autorisation provisoire de séjour (APS) au titre de la protection temporaire. On recense 65 833 autorisations provisoires de séjour accordées à des Ukrainiens fin 2022. Au travers l’accueil des populations ukrainiennes, on voit à quel point le fait d’accéder directement à des droits permet de réussir pleinement une politique d’accueil. *** Nous souhaitons que cette question de l’accueil soit au cœur du projet des socialistes, que nous défendions et affirmions avec courage nos valeurs d’humanisme face à ceux qui les attaquent chaque jour. Il nous faut assumer et prendre à bras le corps ce débat sur le terrain des valeurs, face à la montée de l’extrême droite et des populistes. Il nous faut lutter contre la théorie de l’appel d’air, celle qui considère à tort que des conditions d’accueil indignes pourraient décourager ceux qui souhaitent venir en France et en Europe au péril de leur vie. Dans un contexte politique national marqué par de nombreuses instrumentalisations politiciennes - et notamment le futur projet de loi Darmanin - nous devons réaffirmer que c’est pour nous à l’échelle européenne qu’il est pertinent et cohérent de défendre des politiques migratoires et d’accueil, dignes de ce nom. Mais nous ne pouvons pas nous contenter d’affirmer nos valeurs, nous devons les traduire en propositions concrètes pour répondre à ce défi que représente l’immigration, aux peurs qu’elle suscite, et mettre l’accent sur une politique de l’accueil, intégrant le droit au travail, le droit au logement, la lutte contre le sans-abrisme et les politiques d’insertion. Nos valeurs de solidarité, d’hospitalité et de respect de la dignité humaine, notre responsabilité est de les inscrire dans un projet politique européen et dans des combats concrets que nous voulons mener au sein du Parlement Européen. C’est pourquoi nous souhaitons défendre les propositions suivantes : • Créer un cadre européen, plus protecteur et harmonisé par le haut, des conditions d’accueil des demandeurs d’asile, notamment en matière d’accès au travail, d’hébergement et d’accès à la santé physique et mentale. • Mettre en place un mécanisme obligatoire de répartition/relocalisation entre les États membres afin que les pays de première entrée ne portent plus seuls la responsabilité des demandeurs d’asile arrivant dans l’Union, en tenant compte des attaches familiales et des capacités d’intégration de ces personnes. • Étendre les mécanismes de protection temporaires d’urgence et garantir l’effectivité des droits des demandeurs d’asile au sein de l’Union Européenne. • Renforcer les garanties de protection des mineurs étrangers non-accompagnés au sein de l’Union Européenne et rendre effective dans l’ensemble des États-membres l’interdiction absolue de placer des enfants en détention, quelle que soit leur situation administrative. • Mettre en place un mécanisme de soutien direct et financier de l’Union Européenne aux collectivités locales engagées dans la politique de l’accueil inconditionnel et l’hospitalité sur leur territoire, à l’image de la Ville de Lyon. • Sans externaliser leurs procédures d'asile d'une part et d'autre part sans conditionner leur traitement à cette démarche, renforcer les capacités des États-membres à recueillir de manière coordonnée via leurs réseaux diplomatiques, des pré-demandes d’asile en dehors de l’Union Européenne, comme cela est fait actuellement par certains pays en Afghanistan, en offrant des garanties de sécurité aux personnes menacées, afin de les protéger des entités dont elles fuient les persécutions et des passeurs. • Créer – enfin - un véritable service européen opérationnel de secours en Méditerranée, afin de secourir toutes celles et ceux, embarquées sur des traversées mortelles par des réseaux mafieux et criminels. • Mettre en place une politique européenne ambitieuse d’aide au développement des pays les plus pauvres, d’aide à la conquête des libertés démocratiques et de la paix, d’aide à la lutte contre les conséquences du réchauffement climatique.

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